Rencontre avec Pierre-André Hélène
27/06/2017

Rencontre avec Pierre-André Hélène, raconteur passionné et amoureux de Paris

 

Pierre-André Hélène est l’un des plus grands connaisseurs de l’histoire de Paris et un partenaire privilégié d’ArtLuxury Experience. Reconnu pour son expertise et ses talents d’orateur, il intervient dans certaines des plus belles visites organisées par ArtLuxury Experience, comme l’Opéra Garnier ou l’Hôtel de la Païva. Il nous a également offert l’opportunité unique de privatiser le musée Maxim’s pour des évènements d’exception. Nous l’avons rencontré pour un dîner magique dans un endroit privé au coeur de Paris, le Cercle de l’Union Interalliée…

Bonsoir Pierre-André.

Bonsoir !

Pour commencer, pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?

En quelques mots je dirais que je suis un raconteur. C’est ce que j’aime vraiment faire : raconter de belles histoires de sorte que les gens qui écoutent apprennent en s’amusant. Et c’est extrêmement gratifiant parce que quand j’ai raconté quelque chose pendant une heure, les gens me disent « on vous écouterait pendant des heures ». Cela montre qu’une belle histoire fonctionne à tous les âges. A partir de là, j’ai décliné ce talent en beaucoup de choses, c’est à dire des visites de Paris, de l’écriture, du théâtre, de la télévision, de la radio pendant 8 ans et le musée Maxim’s bien sûr.

Quels ont été votre parcours professionnel, votre formation et les différents métiers que vous avez pu exercer ?

Mon exemple est un très mauvais exemple, surtout à ne pas suivre (rires). Je ne me suis quasiment jamais servi des études que j’avais faites. J’ai fait un master en droit des affaires à Assas dont je ne me suis absolument jamais servi – puisque le droit m’ennuyait à mourir. J’ai ensuite fait un master en Histoire de l’Art qui, je le reconnais, m’a beaucoup plus intéressé. Mais j’ai bien compris que l’Histoire de l’Art ne menait pas à grand chose donc la question suivante s’est très vite posée : « Que pourrais-je bien faire ? ».

A ce sujet, je cite souvent Jean d’Ormesson. Il raconte volontiers que, lorsqu’il avait une vingtaine d’années et que son père lui avait demandé « Mon garçon qu’allez-vous faire dans la vie ? », il avait répondu « Mais rien, bien sûr ! ». C’est exactement la réponse que j’aurais voulu pouvoir faire mais hélas mon état de fortune me l’interdisait… et d’ailleurs la question ne m’a pas été posée (rires) ! Comme je n’avais donc pas les moyens de dire que je ne ferai rien, je m’étais dit : « Que pourrais-je faire qui me donne l’impression de ne rien faire ? ». Et c’est ainsi que j’ai commencé à faire des visites de Paris, parce que raconter de belles histoires me paraissait très facile – et j’ai d’ailleurs mis quinze ans à comprendre que c’était en fait un talent.

J’ai fait ça pendant 17 ans, ça a bien marché, et un jour, tout à fait par hasard, j’ai rencontré Pierre Cardin. Il m’a emmené dans un entrepôt qu’il avait, rempli de meubles Art Nouveau. Symboliquement on marchait dessus : ils étaient entreposés les uns sur les autres, sans ordre. Je lui disais au fur et à mesure « ça c’est très connu c’est d’untel, ça ça me dit quelque chose aussi, et ça c’est pas mal du tout »… et finalement je lui ai suggéré de faire quelque chose de tout cela. Il a répondu : « C’est une excellente idée, d’ailleurs vous allez le faire ! ». Et c’est comme ça que j’ai créé cette collection pour Maxim’s dont je me suis occupé pendant 13 ans, jusqu’à ce que Pierre Cardin décide, à 95 ans, de commencer à se séparer d’un certain nombre de choses.

Donc voilà j’ai d’abord fait des visites de Paris où j’ai présenté plus de 250 sujets différents sur l’histoire de la capitale. J’ai aussi organisé plus de 70 voyages, notamment sur Toulouse-Lautrec (NDLR : l’épouse de Pierre-André étant l’arrière petite-cousine de Toulouse-Lautrec, ils s’occupaient tous deux du château familial où Lautrec avait passé son enfance), à Prague, à Vienne… Véronique (NDLR : l’épouse de Pierre-André) étant chanteuse, nous avons aussi organisé énormément de concerts : nous avons par exemple loué le Théâtre du Trianon pour un concert d’hommage à Yvette Guilbert, chanteuse représentée maintes fois par Toulouse-Lautrec. A la suite de ça nous avons fait le Festival d’Avignon, des concerts dans des hôtels particuliers…

J’ai également fait de la radio pendant huit ans : une chronique de 10 minutes dans une émission appelée Voix contre oreille sur Aligre FM. C’était très sympa car je ne savais absolument pas de quoi nous allions parler en arrivant le matin. J’avais 10 minutes pour m’enquérir du thème de l’émission et trouver une chose intéressante à dire en lien avec ce thème et l’Histoire de Paris. Un très bel exercice d’improvisation.

Je suis également intervenu dans plusieurs émissions de télévision, les plus connues étant Secrets d’Histoire et Des racines et des ailes. Mais je suis intervenu dans le monde entier : j’ai fait 3 émissions pour la NHK au Japon, 3 autres pour la BBC et même pour Al Jazeera, pour la télévision allemande etc.

Bien entendu j’ai publié plusieurs livres, le principal portant sur les palaces en France. Et aujourd’hui j’anime une chaîne YouTube (L’Histoire sans secret), je fais des promenades avec ma Rolls… Voilà, plein de choses !

Vous avez donc commencé votre carrière par des visites de Paris… selon vous qu’est-ce qui rend cette ville si unique ?

C’est certainement parce qu’aux yeux du monde entier – et les Parisiens ne s’en rendent hélas même plus compte – Paris est la ville de l’amour et du romantisme… Et c’est pour cela que la Terre entière vient à Paris. Ceux qui s’imaginent que Paris reste la première destination touristique mondiale à cause des monuments, de l’Histoire, de la gastronomie ou du luxe sont dans l’erreur totale ! Si Paris reste symboliquement la première destination touristique au monde, c’est parce qu’elle incarne l’amour et le romantisme. D’ailleurs, Woody Allen avec Midnight in Paris ne s’en était pas trompé… et à son sujet j’ai une histoire assez amusante !

J’ai reçu Woody Allen pendant 2 heures chez Maxim’s. J’ai reçu 3 metteurs en scène d’importance  chez Maxim’s : Stephen Frears, à qui j’avais prêté de nombreux meubles pour son film Chéri, Robert Zemeckis et Woody Allen. Et lorsque Woody Allen est venu chez Maxim’s avec son équipe, je n’ai parlé qu’au premier assistant, parce que Woody Allen était à côté, chapeau vissé sur la tête, n’écoutant rien, ne regardant rien, ayant l’air totalement ailleurs. Au bout de 2 heures ils s’en vont, et j’observe alors un phénomène extraordinaire. Son équipe se coupe en 2, telle la Mer Rouge dans les Dix Commandements, pour que Woody Allen puisse passer le premier, remontant sa cour, et prononcer ces seuls et uniques mots en 2 heures : « au revoir » (rires)…

Y a-t-il eu des scènes du film tournées chez Maxim’s ?

Oui ils sont venus tourner des scènes, tout à fait. Au moment où le héros retourne à la Belle Epoque, la voiture les emmène chez Maxim’s. Ca lui a plu semble-t-il… Je garde cette anecdote pour mes mémoires (rires).

Quels sont vos endroits préférés à Paris ?

Sans hésitation et en numéro 1 je mettrais l’Opéra Garnier. C’est un lieu merveilleux. A titre professionnel, l’Opéra est une visite merveilleuse, un conte de fées total. Le Fantôme (NDLR : de l’Opéra) est une histoire extraordinaire, d’ailleurs basée sur une histoire vraie ! Donc ça mêle vraiment la magie, la réalité… c’est génial.

A côté de ça il y a plein d’endroits merveilleux à Paris. J’ai un faible certain pour l’Hôtel de Soubise qui est occupé par une partie des Archives Nationales dans le quartier du Marais. C’est un somptueux palais de 1704 avec des décors intérieurs sublimes, dans lequel il n’y a jamais personne. L’Hôtel de Soubise c’est Versailles en mieux, car c’est Versailles sans ses hordes de touristes.

Quelle est l’histoire de cet hôtel ?

Cet hôtel a été construit entre 1704 et 1709 pour le Prince et la Princesse de Soubise qui venaient de Lorraine pour s’installer à Paris. Ils rachètent le vieil Hôtel de Guise et le font  presque entièrement raser – car n’oublions pas que l’ancien n’existe pas encore à cette époque-là. Seulement ils n’ont pas un sou. Madame de Soubise, en femme intelligente, entame ainsi une liaison avec le roi Louis XIV. Et Saint-Simon de dire : « Madame de Soubise portait certains soirs une parure d’émeraudes qui indiquait au Roi que son mari n’était pas là » et d’ajouter : « Grâce à l’intelligence du mari, et au savoir-faire de sa femme, les charges, les pensions, les bénéfices et les chapeaux, tout plut sur la maison ». On considère que la liaison s’est arrêtée à peu près quand l’immeuble a été fini d’être payé (rires)… Voilà ce qu’il faudrait que je raconte dans L’Histoire sans Secret !

A propos d’anecdotes historiques, quelle est votre anecdote préférée chez Maxim’s ?

Ah… c’est vrai qu’il y en a beaucoup ! Peut-être l’histoire des banquettes.

Dans la grande salle, il y avait des banquettes en cuir, qui sont restées de 1898 quand on a fait le décor, à 1959. Elles avaient alors soixante ans – aussi disons qu’elles étaient extrêmement authentiques et qu’il était grand temps de les changer (rires). De ce fait, les ouvriers arrivent pour les remplacer, ne songeant à rien. Sauf qu’à chaque fois qu’ils tirent une banquette d’un mur, ils entendent tinter par terre ce qui jusqu’alors était resté coincé entre le dossier et l’assise des banquettes : les louis d’or, les bagues, les diamants, les bracelets… Des trésors qui tombaient des poches des élégantes, mais qu’elles ne se donnaient jamais la peine de ramasser puisqu’elles savaient très bien que le lendemain elles en auraient deux fois plus (rires) !

Alors que trouvera-t-on dans 20 ans quand on déplacera les nôtres ? Des cartes bleues usagées, ce sera beaucoup moins drôle (rires) !

Quelle serait votre définition du luxe ?

A titre personnel, je dirais que le luxe est l’ensemble des choses qui me mettent au comble du bonheur…

Maintenant, une définition plus générale serait difficile à exprimer. Car le luxe n’est pas une accumulation de choses coûteuses, mais certainement le fait d’avoir la possibilité d’accéder à l’exceptionnel et l’extraordinaire. Il peut s’agir de temps, de choses plus matérielles, de tant de choses…

Alors pour vous, quel serait le plus grand luxe ?

Partir, sans me préoccuper d’où je vais, au volant de ma Rolls-Royce.

Vos projets pour l’avenir ?

J’en déborde !

Deux livres sur le feu chez un éditeur dont j’attends la réponse. Ecrire une nouvelle pièce de théâtre pour quelqu’un d’autre. Dans un an et demi faire un nouveau seul-en-scène. Mon exposition sur Sarah Bernhardt dans 7 villes du Japon en 2018-2019 – et me rendre au Japon me remplit de bonheur parce que je n’y suis jamais allé et je pense que ce sera une expérience merveilleuse. Voilà mes quelques petits projets pour les 2 ans à venir…

Avez-vous une devise ?

Ma devise préférée : « La modestie est une qualité si extraordinaire, qu’avec elle il faut être extrêmement généreux et la laisser entièrement aux autres… » (rires).

De qui est-ce ?

C’est de moi, bien sûr ! Ce n’est même pas de Sacha Guitry (rires).

Pierre-André, merci beaucoup pour cet entretien !

Je suis ravi. Merci beaucoup.

Si vous voulez en savoir plus, ArtLuxury vous propose des visites uniques de l’Opéra Garnier et de l’Hôtel de la Païva animées par ce raconteur d’exception.